Alain Pégouret | Le Sergent Recruteur | Paris

© Romain Zarka

Enfin chez lui ! Après presque 20 ans passés aux fourneaux du célèbre restaurant étoilé : Laurent, Alain Pégouret, l’ancien chouchou de Joël Robuchon reprend, sur l’île Saint-Louis, le Sergent Recruteur.

Ce restaurant qui a vu passer des talents, puis un peu tomber dans l’oubli, assure la relève dignement. Décor blanc, tout en pierre, en bois et en verre, on se sent immédiatement chez Alain comme à la maison. Côté service, il est rapide et discret. L’ambiance est délibérément feutrée, l’attention de rigueur. A la carte, on y retrouve tout ce que l’on aime… à commencer par des produits de saison : Girolles servies avec des lasagnes parfumées aux herbes, œuf d’œuf coulant et crumble d’oignon au parmesan. La noix de veau est parfaitement saisie : à la fois tendre et croustillante. Elle est servie avec une salade de tétragone et toujours ces jolies girolles mais en poivrade. La poulette Culoiselle a été délicieusement rôtie, elle s’entoure d’ail noir, celtuces et cosses de fougères grillées avec des fleurettes d’herbes fortes. Au dessert, l’enchantement est mieux qu’un « nirvana » : pêches et amandes en rafraîchissement, pétales croustillantes au shiso, ou encore : le chocolat en infusion de gingembre, sorbet cacao et citron vert sous une transparence dorée. Le tout (à la carte, sans les vins approche les 95 euros).

Alain Pégouret – crédit Stéphane de Bourgies

Un menu déjeuner à la touche féminine coûtera pour deux plats : 40 euros. Le menu Horizon en 7 assiettes approchera quant à lui, les 180 euros avec vins. « De moi on dit que je suis un chef discret, qui sourit peu… un très loin, il est vrai, des lumières des projecteurs. J’aime en revanche profondément mon métier de cuisinier. Je m’y consacre au quotidien et quand je termine mes heures dans les cuisines au petit matin, je recommence inlassablement. Je suis un créatif sage et déterminé, un gourmet qui sait ce que signifient les mots : plaisir, partage et convivialité ». Alain Pégouret, « le fou de moto », a grandi à Cannes dans une famille de fins gastronomes. Très jeune, il accompagne son père dans les meilleurs restaurants de la région, mais aussi de France. C’est ainsi que se forme son goût.

A 18 ans, il obtient son BEP de cuisine à Cannes, puis entre à Paris chez Jamin, sous la houlette du talentueux Joël Robuchon. Il y reste trois ans comme chef de partie. Second en cuisine avec Christian Constant au Crillon, le passionné poursuit une route toute tracée. Soit : encore chez Constant, mais cette fois rue Saint-Dominique, au Violon d’Ingres. Plus tard, en 2001, chez Laurent, les étoiles du guide Michelin se mettent à remplir le panier. Tout le monde s’en doutait, l’assiette était là pour le prouver.

© Romain Zarka

« Je réinvente en permanence, je dépasse parfois mes limites… Rien n’est jamais acquis, je le sais » souligne Alain en se lançant le plus souvent possible ce qu’il appelle « des défis culinaires ». « J’aime l’émotion du premier jour ! ». N’ayant pas peur de la page blanche, il vient justement de commencer son nouveau chapitre gourmand. « Je me suis imprégné des lieux, je l’ai senti, je l’ai palpé jusqu’à toucher chaque centimètre de marbre, j’ai observé le moindre détail, respiré le cuir, inspecté tous les recoins de la cuisine. Je me sens maintenant parfaitement à l’aise avec « mon sergent » pour l’honorer».

Sa cuisine lui ressemble : simple, décomplexée et surtout : gastronomique ! Une saveur, une odeur, un vin (plus de 100 références à la cave )… Jusqu’au « coup de cœur du producteur », tout est là pour lui fournir l’inspiration. Alain Pegouret relève l’éclat, l’essence qui émane du moindre geste de la main. Raffinée, élégante, subtile et audacieuse : voici la cuisine que chacun attendait dans ce lieu où le visage prend forme sous le casque de sergent recruteur qui trône à l’extérieur, signé par le décorateur espagnol : Jaime Hayon.

© Romain Zarka